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à propos de Ma femme, cette animale

Article paru dans le magazine Marianne.net

« Ma femme, cette animale » d’Hélène Lanscotte : une poésie de l’altérité amoureuse

Par Ella Micheletti

Publié le 08/03/2024 à 17:01

Le mystère d’Autrui sera-t-il jamais résolu ? Et surtout, doit-on réellement percer son insondabilité pour continuer de l’aimer ? Autant de questions qui animent l’Homme et trouvent des fragments de réponses dans le recueil de poésie en prose Ma femme, cette animale. Dernière perle des éditions Cheyne, l’ouvrage, signé Hélène Lanscotte, explore les tréfonds du regard amoureux et de l’identité mouvante voire schizophrénique de l’être cher.

Sans être jamais nommée explicitement, renonçant volontiers à une appellation humaine, l’héroïne se fait liane ondoyante sous le terme générique de « ma femme ». D’ailleurs, le narrateur s’interroge : « La nommer comble-t-il l’écart entre elle et moi ou au contraire favorise-t-il les distances ? ». Dans la sphère amoureuse, l’emploi des petits noms participe sans nul doute à la formation d’une bulle opaque et hermétique au reste de l’humanité. Le temps passant et avec le développement du couple, l’utilisation du prénom officiel, miroir de l’identité sociale connue et saisissable par tous, devient paradoxalement choquante pour les deux parties : « Je prononçais à haute voix son nom, lentement, avec toute la pensée d’une première fois. Surprise, elle m’a regardé comme si j’énonçais le nom de quelqu’un d’autre. »

Entre deux mondes

« Ma femme » quitte aussi le champ de la simple humanité avec fracas, en raison de sa symbiose avec la nature et les animaux. De « Vénus du Paléolithique » qui « me prend entre ses bras ronds, ses cuisses charnues, jusqu’à m’étouffer, enivré », elle devient « tendre prédatrice », un « chat qui, à peine la patte dehors se défait de sa domesticité ». Elle « détale », « marque un territoire » dans lequel elle laisse entrer l’homme qui l’aime, se donne l’espace d’un intense instant tout en pouvant s’échapper la minute suivante. Son univers n’est jamais entièrement pénétrable, simplement car « autrui est ce que moi je ne suis pas », comme l’affirmait Emmanuel Levinas.

Même son corps, terrain des effluves mélangées et des jouissances partagées, peut devenir étrange, étranger. Un soir, explique le narrateur, il « émet une odeur puissante, inhabituelle. Une odeur complexe, capiteuse […] Je n’ai jamais senti d’assez près une lionne, une biche, et encore moins une louve pour identifier une quelconque correspondance – en revanche, je sais que sa peau n’exhale en aucun cas l’ovin ou le caprin ». Cette métamorphose fait que « ma femme existe plus que jamais ».

Mais la plus grande force du recueil d’Hélène Lanscotte réside sûrement dans son art de la formule « absolutiste » (« ma femme vit dans l’air que je respire », « je me promets de ne pas renoncer à sa présence ») de l’amour. À une époque marquée par le culte du changement et les précautions permanentes face au risque de l’échec amoureux, un tel appel à « brûler des questions » (Antonin Artaud) au contact de l’Autre fait figure de miracle salutaire.

Sur son blog

Terres de femmes – terresdefemmes.blogs.com

une lecture critique de Ma femme, cette animale par Angèle Paoli

A PROPOS DE FRINGALES

. 20 juillet – une annonce-lecture FIP par Audrey Stupovski

. 7 juillet – Magazine FLOW

. 2 Mars – Magazine Service Littéraire, quelques lignes dans la rubrique « On trouve ça bien », page 2, de Bernard Morlino

. 15 février – article de Maryse EMEL sur le site NONFICTION, « Mettons-nous à table » https://www.nonfiction.fr/article-10200-mettons-nous-a-table.htm

. Janvier – POINT DE VUE, p 22- Quelles plumes/Spécial rentrée littéraire d’hiver

. Janvier – Magazine Voici